Titre inconnu (Gilles Aillaud, Lyon, 1987)
Notice+
Avec cette œuvre, Gilles Aillaud nous met face à deux paysages sur plusieurs dizaines de mètres carrés. Le premier nous raconte « [...] l'ascension d'une montagne grecque, les pierres et les éclats de marbre, les épines et les chardons, les buissons de sauge et d'origan »1, le second « montrerait terre, mer et ciel comme pris dans le tourbillon de la vie des oiseaux de mer, le tourbillon incessant de leur vol et de leurs cris »2.
L'artiste utilise ici la technique de l'huile sur toile et déploie un motif de taches dessinant ces paysages. Il joue sur la densité de ce dessin et sur la place qu'il laisse au vide de la toile blanche, pour que ces taches deviennent figures, pour que les formes prennent vie. La peinture de Gilles Aillaud donne à la matière une place importante et cette matérialité est le témoin de la frénésie avec laquelle il peint. On décèle dans la touche picturale les mouvements de son créateur maniant avec excellence une palette aux couleurs vibrantes et un travail de la lumière aiguisée.
Avec cette œuvre, Gilles Aillaud tend à nous plonger physiquement dans les paysages qu'il peint. Jean Jourdheuil disait de sa peinture qu'elle « s'efface à mesure qu'elle fait apparaître », qu'elle est « un regard sans paupières »3.
Le caractère environnemental de cet ensemble artistique se dévoile à nous dans le rapport qu'entretiennent ces deux toiles monumentales avec l'architecture. La nature envahit l'intérieur du bâtiment par un jeu de bassins et d'espaces verts (conçus par l’architecte Philippe Dubois en 1987) et l’œuvre de Gilles Aillaud contribue à contrefaire ce paysage qu'on aurait emprisonné à l'intérieur.
Cet enfermement pourrait faire écho au travail de l'artiste, puisqu'il a passé la plus grande partie de sa carrière à peindre des animaux enfermés dans le simulacre de la nature que représentent leurs enclos, leurs cages, leurs volières. Malgré tout, les oiseaux qu'il représente ici volent dans les airs comme dans une ode à la liberté.
Cette thématique picturale du paysage, Gilles Aillaud l'a aussi créée comme un clin d’œil aux départements scientifiques qui habitent ce bâtiment. Il représente ici la Science dans l'expérience corporelle qu'il nous arrive d'en faire, plutôt que de la connaissance que nous en avons4. Il veut nous conduire vers la sensation pour échapper à l'idée : « Je peins des choses, je suis absolument incapable de peindre des idées. Je peins des choses parce que la force des choses me paraît plus forte que toute idée. »5
En ces termes et par le choix de la peinture figurative, Gilles Aillaud représente un des contre-pieds de l'avant garde dominante à son époque qui s'incarnait dans l'abstraction ou l'art conceptuel. S'il côtoie ces artistes de l'avant garde, Gilles Aillaud refuse de céder aux effets de modes qui régissent le marché de l'art. Il est de plus, un homme aux multiples casquettes d'écrivain, de poète et de metteur en scène. C'est donc la marque d'un artiste hors normes, qui, après des études de philosophie et un échec à l'oral du concours de l'Ecole Normale en 1948 est finalement entré à l'ENS par un chemin qu’il a lui-même tracé, en autodidacte effréné.
1- Rectorat de Lyon, Projet de un pour cent décoration par la commission nationale, G. Aillaud, Albert Ayme, 1986.
2- Ibid.
3-Jean Jourheuil, Un théatre du regard : Gilles Aillaud le refus du pathos, coll.les cahiers de l'Odéon, Christian Bourgeois, Paris, 2002.
4-Ibid.
5-Propos reportés de Gilles Aillaud dans : DARY Anne dir. ,Gilles Aillaud 1928-2005, Coédition musée des Beaux-Arts, Rennes / musée Estrine, Saint-Rémy-de-Provence / FRAC Auvergne / Somogy éditions d'Art, 2015.
Œuvre
Titre | Sans titre |
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Description Seize toiles composent deux paysages marins monumentaux dialoguant avec l'architecture de Philippe Dubois (1987), son jeu de bassins et d'espaces verts. La nature s'invite alors à l'intérieur constituant une expérience corporelle pour le spectateur. | |
Date | 1987 |
Nature | pérenne |
Programme | 1% artistique |
Numéro d'inventaire | ENS 2016.0.7 |
État de conservation | état critique |
Précision sur l'état de conservation | empoussièrement, salissures, traces d'oxydation |
Période | art contemporain |
Domaine | peinture |
Couleur | blanc, bleu, gris, kaki, marron, noir, vert, violet |
Matériau | peinture, toile |
Techniques | Huile sur toile |
Hauteur (m) | 11 |
Largeur (m) | 8 |
Précision sur les dimensions | dimensions approximatives |
Sujet représenté | Paysage marin |
Commanditaire | ENS Lyon |
Propriétaire | ENS Lyon |
Site
Lieu | École normale supérieure de Lyon |
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Adresse | 46 Allée d'Italie |
Code postal | 69007 |
Ville | Lyon |
Département | Rhône |
Région | Rhône-Alpes |
Pays | France |
Détails sur le site Site MONOD | |
PMR | site accessible aux personnes à mobilité réduite |
Latitude/Longitude | 45° 43′ 47″ N 4° 49′ 38″ E |
Artiste
Cartel détaillé réalisé par Nora Evain Bentayeb, dans le cadre d'une mission de valorisation du patrimoine artistique de l'Ecole normale supérieure de Lyon.
Références bibliographiques :
- DAGEN Philippe dir., Académie de France à Rome, Gilles Aillaud, Editions Hazan Paris, 2007
- DARY Anne dir., Gilles Aillaud 1928-2005, Coédition musée des Beaux-Arts, Rennes / musée Estrine, Saint-Rémy-de-Provence / FRAC Auvergne / Somogy éditions d'Art, 2015
(Exposition présentée au musée des Beaux-Arts, Rennes, du 17 janvier au 17 mai 2015, au musée Estrine, Saint-Rémy-de-Provence, du 30 mai au 30 août 2015 et au FRAC Auvergne, Clermont-Ferrand, du 2 octobre 2015 au 11 janvier 2016.)
- JOURDHEUIL Jean, Un théâtre du regard, Gilles Aillaud : le refus du pathos, Collection « Les Cahiers de l'Odéon », Editions Christian Bourgeois, 2002
- LHERITIER Amandine, ECOLE NORMALE SUPERIEURE DE LYON : Architecture, Interventions artistiques, Mémoire de Maîtrise, sous la direction de Mme Dominique BERTIN, Lyon Université Lumière Lyon II, 1996
- PESQUES Nicolas, Gilles Aillaud, Editions André Dimanche, 2001